L’Enfennec

Allez d’abord voir ma fiche sur L’Enlouve ( littérature ) et n’hésitez pas à lire tout les livres sur les Humanimaux ( ou au moins un )

Je me réveillais en sueur sur mon lit. Ma grotte était entrouverte, rien d’anormal jusque-là. Sûrement un mauvais rêve. Cela ne pouvait être possible… Il fallait que je me change les idées. Je sortis de ma grotte et marchai sur le sable un petit moment avant d’arriver au Centre. L’encelot m’attendait comme toujours devant la cantine. Il s’admira devant son miroir de poche et dit d’un ton théâtral : “ En tant que Ocelot je tiens à déclarer que je devrais participer à la pièce de théâtre cette année. Bien sûr, en tant qu’acteur principal ! “
– Et pourquoi ça ? répondis-je
– La pièce de théâtre est Ocelot de Shakespeare donc ça serait logique. Et en tant que moi même lorsqu’on a joué La Belle et la Bête, je ne jouais qu’un vulgaire chat. Donc c’est à mon tour d’avoir le beau rôle !
-Bon allons manger. T’es vraiment bête avec tes mauvaises plaisanteries : c’est pas Ocelot c’est O-h-t-e-l-l-ot !
-T’as pas la pêche aujourd’hui ! Dommage, c’est l’anniv de L’enchat, on aurait pu l’embêter.
L’engerboise arriva en sautillant. Je la regardai d’un air reconnaissant. Disons que je déteste mentir et en plus à L’encelot, mon meilleur ami ça aurait été une véritable torture. L’engerboise fit remarquer à tout le monde ma mine affreuse, et d”un coup j’étais moins reconnaissante envers elle. Je bafouillai deux excuses et m’enfuis discrètement vers le stand des saucisses. 

Mon petite dej en main, je m’assis à un table en plastique et mangeai voracement. Peut-être que manger avec mes amis ou même mes ennemis m’aurait fait oublier l’Idée mais j’avais besoin d’être seul. Je réfléchis un bonne quinzaine de minutes à l’Idée mais en vain. Rien ne se dessinait clairement. L’Idée est une sorte d’obligation de s’échapper du centre. Et moi L’enfenec j’ai été envahi par ça dès mon enfance. On m’a raconté que d’autres Humanimaux comme moi ont été touchés par l’Idée. Mais je pense que je suis plus spéciaux qu’eux : j’ai un pouvoir. Il n’est pas encore très bien maîtrisé et il n’est pas très fort mais il évolue doucement. J’ai découvert après des années d’entraînement en quoi il consiste. En fait, je suis un être vivant mi humain mi animal. Je pense que c’est pour cela que j’ai un pouvoir. Ma partie animale est une âme de fennec, comme on peut le remarquer.  Quand je me regarde dans les vitrines ou bien dans les miroirs de l’école de danse, je n’ai pas honte. Mes yeux noirs et globuleux sont plutôt mignons. L’encelot aime beaucoup me faire remarquer que j’ai toujours une lumière à l’intérieur de mes yeux. Il dit “Ta chandelle ne s’éteindra jamais, ton intelligence non plus” Cela peut paraître flatteur mais dans sa voix à chaque fois, il y a toute la sincérité du monde. Mes longues oreilles, elles, sont ridicules. Elles touchent le plafond de ma grotte et je dois les cacher sans cesse sous un bonnet. Elles sont poilues mais à certains endroits, une peau beige et fine apparaît comme si on m’avait rasé : c’est la seule partie de mon corps dont j’ai honte. Mon nez effilé aime renifler les délicieux pancakes de L’engirafe, la cuisinière. Avec mes petites mains d’humain, je les volais discrètement puis courais de toutes mes forces. Mes cheveux d’humain s’emmêlent régulièrement à mes poils sableux. J’imagine que c’est l’effet du sable, du vent et de ma phobie des douches. Pour résumer, j’ai un visage de fennec, des cheveux courts et blonds d’humain, une queue fourchue et mouvementée de fennec et finalement des mains joueuses et des pieds rapides d’humains. Je porte souvent une veste en jean assortie avec mon bonnet bleue mer en laine. Une éternelle broche en forme de chameau essaie de rester accrochée sur mon jean troué qui montre mes genoux écorchés. Sur mon tee-shirt délavé un phrase en noir s’affiche : “Le renard du désert”

L’enchat me sortit de mes rêveries et bouscula ma sacoche au motif de guerre. Mon cahier de notes confidentielles tomba et L’enchat s’enfuit avec le carnet en ricanant : “Eh le fennec, viens m’attraper si tu peux ! On joue à Chat contre Fennec ?” Je me levai rapidemment et courut les ratrapper ( le carnet et L’enchat ). L’engerboise sautilla vers moi avec difficulté et L’encelot courut de toutes sa vitesse ( c’est-à-dire HYPER vite ) mais L’ensouris l’amie de L’enchat lui fit un croche patte. L’engerboise essoufflée abandonna la course poursuite qui s’avérait très longue. L’enchat prit un raccourci par la plage pendant que moi je me battais contre des fougères particulièrement tenaces. La chevauchée se poursuivit pendant une bonne quinzaine de minutes. Soudain l’Idée me revint. Elle n’était plus floue. Je savais qu’il fallait m’enfuir du Centre. Une partie du feuillage était cassée. Je m’y aventurai avec peine en soufflant bruyamment. Mon carnet pouvait attendre, il n’y avait pas non plus des trucs si confidentiels que ça. Les murs du Centre sont en béton gris mais celui-ci était légèrement teinté de rose et un gros trou s’y logeait. L’Idée m’encouragea à m’avancer.

L’enchat vint vers moi. Je le fis basculer pour prendre mon carnet et j’attendis sa réaction. Il ne dit rien en voyant le trou, il ne fit rien. Je ne compris pas. Il avait juste les yeux fermés. J’attendis puis l’Idée me fit comprendre. C’était mon pouvoir qui agissait et je pouvais faire ce que je voulais : lui faire tout oublier, lui faire prendre un coup de soleil ou l’envoyer dans un pays. Je ne savais pas trop quoi faire, donc je lui fis simplement perdre la mémoire avec difficulté. J’étais à bout, mes mains suaient et mon corps tremblait. Au loin, j’entendis des voix. Avec toutes la force qui me restait je réussis à me lever et à soulever L’enchat. Une infirmière, L’engirafe et le directeur arrivèrent en trottinant. Heureusement j’étais déjà sorti sur la plage ce qui me permit de leur cacher le mur. Bouleversé, je n’expliquai presque rien et je donnai le corps de L’enchat. L’encellot me dit plus tard qu’il s’était évanoui et qu’il allait mieux. Après cette journée épuisante je rentrai dans ma grotte et m’allongeai. L’Idée réapparut alors et soudain j’entendis une voix : “Improvisation, improvisation, improvisation…” Je m’endormis aussitôt sur mon matelas-bouée.

Je me réveillai doucement et avec peine. Il fallait que j’improvise. Je pris ma sacoche posée à même le sol et mis deux vestes, une couverture, une pomme, un guide et mon cahier à l’intérieur. Une lampe torche à la main, je sortis. Je m’attendais au noir et au silence total mais la lune était brillante et les grillons donnaient un concert. Je marchai sur le sable mouillé pendant un moment en observant le Centre. L’encelot et L’engerboise allaient me manquer. Je n’avais préparé ni lettre ni même un petit post-it pour leur dire au revoir. J’improvisai. Sur le sable j’écris : L’encelot du lac et L’engerboise à la framboise ❤ . La vague effaça le coeur et je pleurai. Je courus jusqu’au muret rose, m’enfuis par le trou et marchai dans la forêt. La sensation que L’Idée me surveillait s’envola mais une nouvelle arriva. Celle de la liberté. Celle d’avoir réussi.  Le vent me soulevait les cheveux. Les lucioles voletaient près de moi. Seul et paisible.

Les étoiles ressemblaient au sable du Désert.

Irène Lermigeaux.

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